mardi 22 juillet 2014

Dépasser la dominance

La dominance, que l’on peut définir comme la suprématie absolue d’un individu sur un autre, est une théorie très répandue dans les milieux cynophiles. Ce modèle hiérarchique pyramidal sert aussi bien à décrire les relations entre les chiens que celles entre les canidés et les humains. Décryptage d’un mythe.

La théorie de la dominance et de l’alpha est née il y a quelques décennies avec des études menées sur des loups par le docteur Frank Beach. Forte d’un grand succès, elle a été vaillamment transposée au chien domestique, puis s’est imposée dans la culture cynophile. L’idéologie s’en est mêlée, le chef de famille, maître sur ses sujets inféodés, devant aussi régner sur son chien sous peine de grands débordements, voire de révolution sanglante.

Depuis, l’éthologie s’est penchée sur le chien de compagnie, canis familiaris, longtemps tenu en mépris en raison même de sa proximité avec l’être humain. Ainsi Adam Miklosi, de l’université de Budapest. Et Frank Beach est revenu sur ses observations : les loups étaient captifs (ce qui faussait tout), les analyses erronées – la mise sur le dos, par exemple, n’est pas imposée par le loup le plus assertif mais initiée par son subordonné, qui lui propose la soumission de son plein gré, de manière volontaire et ritualisée. Néanmoins, malgré les voix des spécialistes, la dominance continue à être enseignée, transmise, entendue. Il est populairement admis que les chiens cherchent à se dominer, à nous dominer, qu’il faut les soumettre pour éviter tout danger. L’erreur ne serait pas grave si elle n’impactait pas la manière dont on pense les chiens, dont on agit avec les chiens, dont on dresse et rééduque les chiens.

La dominance intraspécifique

Le chien n’est pas un loup : de cette affirmation découle que la transposition stricto sensu du modèle de Frank Beach était en soi une aberration. De surcroît, les études ultérieures ont démontré que les meutes de loups libres ne fonctionnaient pas selon un schéma hiérarchique mais selon un modèle familial : un couple parental associé à sa descendance, de l’année ou d’autres années. Et que la collaboration, la coopération et surtout la ritualisation formaient le socle de ces groupes plus sûrement que la violence fantasmée. Parallèlement, les recherches sur les chiens marron ou sur leurs homologues domestiques ont toutes conclu que la dominance chez le chien est fluctuante, affaire de rencontres, de circonstances, de ressources.

Les chiens, qu’ils soient féraux ou familiers, s’associent plutôt par paires, ne forment pas des meutes mais des groupes changeants, et engagent quotidiennement de multiples interactions qui n’ont strictement rien à voir avec les rapports de force. Ils jouent, communiquent, s’apprécient ou ne s’entendent pas, s’évitent ou recherchent mutuellement le contact, s’ignorent, s’éloignent ou se rapprochent et, surtout, ritualisent leurs conflits pour ne pas avoir à se mettre en danger. Ainsi les bagarres des mâles, spectaculaires et bruyantes, dont l’on s’étonne ensuite qu’elles rien n’aient occasionné de grave, tout au plus quelques touffes arrachées.

Au sein d’une même famille, les chiens se partagent les prérogatives. L’un sera plus sensible aux déplacements, l’autre à la nourriture, le troisième aux contacts affectifs. Si dominance il y a, elle varie donc en fonction des sensibilités de chacun. Et elle est surtout déterminée par la capacité d’un des sujets à accepter de laisser la priorité à l’autre. Sans agressivité, en bonne entente. Elle n’est pas innée, inscrite une fois pour toutes dans un individu précis, elle change au gré des possibilités et des interactions. Il est ainsi rare de trouver des chiens qui affirment leurs prérogatives sur tous les postes. Elle n’est pas un « en soi », immuable : elle nécessite des interactions avec un congénère, dans un mouvement dynamique de va-et-vient (actions / réactions).

La dominance interspécifique.

Mais le plus important, c’est que la dominance n’entre en jeu que dans une relation intraspécifique, en aucun cas dans une relation interspécifique. Ainsi, s’il est un mythe qu’il importe vraiment de déconstruire, c’est celui de la dominance entre chiens et humains. Il a été prouvé, scientifiquement, que la dominance ne peut pas s’exercer entre espèces différentes. Les chiens ne sont pas des humains, nous ne sommes pas des chiens : la théorie s’effrite. Point final.

Qu’en est-il des comportements non désirés ?

Moult raisons, bien éloignées d’une quelconque dominance, peuvent conduire un chien à adopter des comportements non désirés par ses propriétaires. Ainsi, un chien qui tire à la laisse est-il réellement en défaut de « soumission » à son maître ? Et si la promenade était pour lui un plaisir immense, ou trop rare ? Son excitation à la hauteur de l’énergie accumulée au cours de sa journée languissante ? Et si, tout simplement, il avait fait l’apprentissage que l’action de tirer l’amenait plus vite aux endroits désirés ?

La plupart du temps, l’étiquette « chien dominant », bien confortable, évite de se poser les bonnes questions, celles qui permettraient des changements durables et un assainissement relationnel. Plus grave, les réponses apportées par les tenants de la « dominance » peuvent nuire gravement au lien entre le chien et son propriétaire car elles sont toujours coercitives, frontales et conflictuelles. Par exemple l’« alpha roll» et bien d’autres techniques du même acabit, qui ne signifient rien pour le chien et peuvent, à terme, le conduire à se méfier de son maître, à douter de lui, voire à en avoir peur. Les partisans de la dominance pensent qu’il faut passer les portes et manger avant son chien, lui interdire toute position haute et le contraindre physiquement au moindre débordement. Autant de clichés sans fondement éthologique.

Débarrassé d’un fardeau

Finalement, la dominance semble surtout un fourre-tout bien pratique, permettant de s’épargner une observation rigoureuse des animaux et une prise en compte de leur réalité et de leurs émotions. Avouons-le : en abandonnant le mythe de la dominance, l’on se sent soudain débarrassé d’un fardeau. D’une charge délétère, qui empoisonne peu à peu, irrémédiablement, le lien si précieux que l’on peut nouer avec son chien. Etrangement, lorsque tout s’apaise, en soi puis avec l'autre, l’on s’aperçoit alors que personne ne souhaitait prendre le pouvoir, qu’il était juste question d’être chacun à sa place, dans le respect et la complicité.

Marie Perrin

samedi 19 juillet 2014

Membre du réseau Vox Animae

Formée par Laurence Bruder-Sergent et Vox Animae, je suis membre du réseau Vox Animae.
 
A ce titre, en tant que comportementaliste et en tant qu'éducateur canin, je respecte la charte Vox Animae, qui est la suivante :
 
Chaque membre du réseau VOX ANIMAE s'engage à :
 
1/ Mobiliser toutes ses connaissances et son énergie afin d’aider son client à solutionner les problématiques qu’il rencontre avec son animal, au besoin avec l’aide du réseau Vox Animae
 
2/ Donner toutes les informations demandées par le client, expliciter les raisons de ses conseils, se rendre disponible pour tout renseignement sur ses méthodes, ses compétences et de ses spécialités
 
3/ Veiller à toujours respecter les émotions, l’équilibre psychologique et éthologique des animaux et des humains avec lesquels il travaille
 
4/ Conseiller avec la même bienveillance toutes les personnes quelles que soient leurs origines, leurs mœurs et leurs situations de famille, leur appartenance ou leur non-appartenance à une ethnie, une nation ou une religion déterminée, leur handicap ou leur état de santé, leur réputation 
 
5/ S’adapter à son client par un vocabulaire intelligible pour lui
 
6/ Utiliser des pratiques non violentes physiquement et psychologiquement pour l’animal ou l’humain pour lesquels il travaille. Les colliers étrangleurs, sanitaires, torquatus, électriques, à jets de citronnelle et autres outils occasionnant des douleurs ou des peurs à l’animal sont proscrits par le réseau Vox Animae
 
7/ S’assurer que ses propositions de changement sont acceptables pour le client et correspondent à ses besoins réels 
 
8/ Informer son client sans la moindre ambiguïté, des risques éventuels résultant d’une mise en œuvre incomplète de ses conseils
 
9/ Ne pas divulguer des informations personnelles concernant ses clients à autrui (à l’exclusion des confrères susceptibles de le seconder) et respecter le secret professionnel de rigueur
 
10/ Ne pas diffuser, publier ou citer les noms des clients, leurs animaux, ni leurs situations personnelles sans leurs autorisations
 
11/ Ne pas dénigrer, critiquer, attenter à l’intégrité professionnelle ou personnelle du réseau Vox Animae ou l’un de ses membres. En cas de manquement grave et avéré, dans le comportement, les paroles ou les comportements d’un membre du réseau, il en informe Vox Animae qui prendra les dispositions de rigueur
 
12/ Ne pas engager Vox Animae dans une action ou une déclaration, ni ne parler en son nom, sans avoir obtenu l’accord de ses dirigeants au préalable
 
13/ Se former régulièrement et se tenir au courant des dernières avancées dans les connaissances de l’éthologie ou de la psychologie
 
14/ Ne pas s’engager à donner des conseils sur la santé des animaux, les médicaments à utiliser, ni les soins à effectuer
 
15/ Il peut par contre se faire aider, travailler conjointement ou s’associer avec un professionnel diplômé d’une Ecole Vétérinaire, un ostéopathe, naturopathe, praticien en phytothérapie ou autre
 

samedi 5 juillet 2014

Après-midi chiens-loups

Partir à la rencontre des chiens-loups...
 
 (Photo : Marie Perrin)
 
Propriétaire de plusieurs chiens-loups, de Saarloos et tchécoslovaques, j'ai constaté, au fil des années, qu'ils ne laissaient jamais indifférents. Pratiquement pas une promenade, pas une sortie dans le monde cynophile, sans que mes chiens ne soient le centre de l'intérêt, suscitant moult questions de la part de néophytes a priori fascinés.
 
L'an passé, j'ai eu la chance de pouvoir parler des chiens-loups à de futurs comportementalistes et éducateurs canins dans le cadre des formations Vox Animae. Cette année, j'ai décidé de proposer une après-midi découverte des chiens-loups à titre personnel, encouragée par de nombreuses demandes...
 
Le "stage" aura lieux demain, dimanche 6 juillet, à partir de 13h30, au club canin de Geispolsheim gare, rue de la batterie.
 
L'après-midi se déroulera de la manière suivante :
 
* 13h30 : accueil des participants
 
* Début du stage avec présentation des deux races officielles de chiens-loups, les Saarloos et les tchécoslovaques :
 
- origines des deux races
- similitudes et différences entre les deux races
- spécificités des chiens-loups
- vivre avec un chien-loup
- aborder un chien-loup 
 
* Présentation des chiens-loups présents
 
* Tour de table des propriétaires
 
* Présentation du BARF
 
* La communication canine :
 
- quelques mots sur les signaux d'apaisement, les rituels, etc
- atelier pratique avec découverte des interactions entre plusieurs chiens-loups
 
* Promenade récréative
 
* 17h30-18h00 - approximativement - : fin de l'après-midi