Educatrice de renommée internationale,
fondatrice de l’école des chiots norvégienne, Turid Rugaas a voué sa vie aux
chiens et à leur bien-être. Elle les a regardés vivre et interagir, a essayé de
les comprendre. Durant plus de dix ans, elle a notamment analysé le langage
corporel du chien et ses recherches sur les signaux d’apaisement sont
aujourd’hui mondialement connues.
Les chiens possèderaient un répertoire d’environ
trente signes, peut-être plus. Les uns servent à s’apaiser soi, d’autres à
apaiser l’autre. Tous les chiens n’utilisent pas tous ces signaux :
certains individus ont un vocabulaire plus riche que d’autres. Ils les
utilisent entre eux, pour communiquer avec leurs congénères, mais aussi avec
les êtres humains, lesquels malheureusement ne les comprennent pas toujours.
Or lorsqu’on ne prend jamais en compte les signaux
émis par le chien, on court le risque de le voir développer des troubles du
comportement, des conduites agressives, de la nervosité ou du stress. C’est
pourquoi il semble important de parler de ces signaux et de former les gens à
les reconnaître et à les respecter.
En cours d’éducation, un chien qui s’ébroue, se
gratte, bâille ou se met soudain dos tourné se fait généralement rabrouer et
vertement tancer. Il ne fait que notifier son inconfort, mais les humains le soupçonnent
aussitôt d’indiscipline, de désobéissance, voire de rébellion… et le
houspillent !
Quel apprentissage ce chien fait-il ainsi ? Tout
simplement que ses signaux, socle d’une vie sociale harmonieuse, ne servent à
rien dans un monde d’humains. Un facteur de stress intense, évidemment. Et un
coup de canif de plus dans la communication interspécifique, déjà bien malmenée
par les incroyables exigences que nous faisons peser sur nos chiens... Et par l’incroyable
anthropocentrisme dont nous faisons preuve en permanence, incapables de nous
adapter à la spécificité de l’autre, du différent.
Quels sont ces signaux ?
Bâiller, se lécher, tourner le dos ou la tête,
s’arcbouter (posture de salut ou d’appel au jeu), renifler le sol, marcher
lentement ou en arc de cercle, se figer, s’asseoir ou lever une patte,
« sourire », remuer la queue, coller les oreilles sur le crâne,
s’allonger ventre contre terre, se lécher les babines, uriner sous soi,
s’ébrouer : autant de signaux très clairs entre chiens, qui peuvent se
combiner entre eux pour former toute une grammaire du « bien vivre
ensemble ». Les chiens ne s’y trompent pas, il n’y a que nous pour n’y
rien comprendre!
Et pourtant, à force d’entraînement, l’on se rend
compte que certains signaux sont très aisés à reconnaître. L’on peut même,
ensuite, en utiliser certains soi-même pour apaiser son chien, ou un chien
inconnu. Tourner la tête face à un chien, avancer lentement ou en arc de
cercle, se faire plus petit : autant de possibilités pour lui signifier
que nos intentions sont pacifiques.
Certains auteurs préconisent ainsi d’utiliser les
positionnements pour apaiser son chien lorsqu’il manifeste de l’anxiété :
ainsi, en cas de peur d’un événement donné, se mettre dos au
« danger » (perçu comme tel par le chien) mais face au chien. Ceci a
valeur anxiolytique et a souvent pour effet de faire immédiatement baisser la
tension de l’animal.
Un vrai langage corporel
Evidemment, tout ceci n’a
pas valeur scientifique : les conclusions de Turid Rugaas n’ont jamais été
validées dans des laboratoires d’éthologie. Néanmoins, même s’il s’avérait que
le terme « apaisement » n’est pas approprié, tous ces signaux n’en
demeurent pas moins un vrai langage corporel, émis par les chiens pour
signifier leurs intentions, leur inconfort, bref éviter de rentrer en conflit…
Et si d’aucuns, dans la cynophilie française, se gaussent de l’intérêt que nous
pouvons porter à leur décryptage, et du soin que nous mettons à les respecter, qu’importe !
Nos chiens, eux, nous montrent tous les jours, par leur quiétude et sérénité,
que nous sommes indubitablement dans le vrai…
Marie Perrin
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