Des dizaines de chiens ou de chats
entassés dans des deux-pièces, dans la plus totale insalubrité. Des lapins, des
cochons d’Inde, des canards ou des serpents en trop grand nombre, dans le noir d’une
cave ou la crasse d’une maison pestilentielle. Lorsque les associations ou les
autorités interviennent, il est souvent trop tard : parfois alertés par
des voisins, les enquêteurs découvrent des logements dévastés. Et des animaux
en très grande souffrance.
Une maltraitance passive
Le schéma de ces affaires varie
peu : les propriétaires ne voulaient que le bien de leurs animaux, ils ont
été emportés par leur passion, ils n’ont pas su dire non. Manque d’argent,
détérioration des habitations, bientôt la situation leur a échappé, s’est
retrouvée hors contrôle. Ils étaient dépressifs, ne se sont pas rendu compte. A
l’instar des personnes souffrant d’addiction, ils sont dans le déni, pensant « que
tout est parfaitement normal ». Ils ont 50 chats ? Peut-être, mais
personne ne peut les aimer autant qu’eux. Et peu importe si leurs chats sont
stressés, malades, mourants…
Ce qui compte dans cette
affection, ce n’est pas tant le nombre d’animaux détenus que la capacité du « propriétaire »
à les soigner tous convenablement. Une personne atteinte du syndrome de Noé ne
peut tout simplement pas subvenir aux besoins (physiques et psychiques) de ses
animaux. Elle s’isole, se replie sur son univers. Sa collectionnite peut fonctionner
un temps, puis un grain de sable vient gripper la mécanique, et tout s’effrite.
Dépassé, débordé, le malade s’enfonce, entraînant ses animaux dans sa chute.
D’effroyables affaires vécues…
Quelques affaires vécues me
reviennent en mémoire, du temps où j’intervenais sur le terrain avec Le Refuge
de l’arche de Noé, association de protection des animaux de rente basée
dans le Bas-Rhin, près de Strasbourg. La toute première nous a emmenés dans les
Vosges, dans un tout petit village où « sévissait » une dame âgée,
d’origine allemande. L’association avait été prévenue par des chasseurs du
secteur, qui s’inquiétaient de trouver des cadavres de chevaux dans la forêt. Des
carcasses d’équidés enterrées dans l’épais fumier, des chiens infestés de
parasites au point que l’un d’eux avait dû être euthanasié, des animaux
ensauvagés, qu’il avait été bien difficile d’attraper et de transporter :
sur place, la situation était terrible. En Allemagne, cette « Cruella des
Vosges », comme elle allait être surnommée lors de son procès, n’avait
plus l’autorisation de posséder le moindre animal de compagnie, fût-il poisson
rouge. Elle avait donc franchi la frontière, et poursuivait ses funestes
activités en France.
A bien d’autres reprises, par la
suite, Le Refuge de l’Arche de Noé a
été confronté à des situations similaires. Comme cet aviculteur que la mort de
sa maman avait fait « dérailler »… Nous avons sorti les cadavres de
lapins et de volailles sur des brouettes, par dizaines. Les rescapés ont été
rapatriés dans les locaux de l’Arche, soignés puis placés en familles. Ces
« entassements » d’animaux, au mépris de la loi, de la logique, de
tout bon sens, sont finalement assez courants. L’on s’en aperçoit vite quand on
commence à s’implique dans la protection animale.
Les « animal hoarders » : quel profil ?
D’après une étude menée au Québec
par les services sociaux et de santé, le profil des personnes souffrant d’animal
hoarding serait le suivant : à 75% des femmes, seules, possédant en
moyenne 39 animaux. Les espèces concernées seraient à 81% les chats, à 55% les
chiens, à 17% les oiseaux, les petits mammifères, bétail, chevaux et reptiles
se partageant le reste*. Pour certains auteurs, il s’agirait d’une forme de TOC
(troubles obsessionnels compulsifs), lesquels toucheraient environ 2% de la
population. S’il ne s’agit évidemment pas d’un problème majeur de santé publique,
le « syndrome d’hébergement d’innombrables animaux» (tel que nommé en Belgique)
n’en reste pas moins une terrible réalité, dont il faut parler quand on aime
les animaux et qu’on se soucie de leur bien-être.
Marie Perrin
Pour aller plus loin :
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Une vidéo, dans laquelle un bénévole de la SPA
pointe fort justement du doigt les carences psychologiques subies par des chiots
nés dans de telles conditions…
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Une vidéo réalisée par la SPA de Besançon :
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Une autre vidéo, d’un couple qui « collectionne »
les chats :
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Un article paru dans le «Huffington Post» :
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Un article d’«Ouest France» sur le syndrome de
Diogène, apparenté au syndrome de Noé mais concernant les objets :
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Enfin, un numéro de Xenius, l’émission d’Arte,
consacré à la syllogomanie :